Les Pierres sauvages (CADRE ROUGE)
Category: Livres,Romans et littérature,Littérature française
Les Pierres sauvages (CADRE ROUGE) Details
Ce roman se présente comme le journal du maître d'œuvre qui, au douzième siècle, édifia en Provence l'abbaye du Thonoret, exemple d'Architecture cistercienne. Jour après jour, nous voyons ce moine constructeur aux prises avec la faiblesse des hommes et l'inertie des choses, harcelé par les éléments contraires et, plus encore, par ses propres contradictions. La vie d'un chantier médiéval, les problèmes techniques, financiers ou doctrinaux que posait sa bonne marche, les solutions d'une étonnante modernité qui leur furent données apparaissent ici bien peu conformes à ce Moyen-Âge de convention dont l'image encombre souvent nos mémoires.Cependant, cette vivante chronique de la naissance d'un chef d'œuvre, appuyée à la fois des recherches historiques originales et sur une longue expérience du métier de bâtisseur, est aussi une réflexion passionnée sur les rapports du beau et du nécessaire, de l'ordre humain et de l'ordre naturel. Et elle est encore une méditation lyrique sur l'Ordre en lequel tous les ordres ont leur place, et sur cet art qui rassemble tous les autres : l'architecture.Mais elle est, d'abord, un acte de foi.

Reviews
« L??architecture garde une partie de son mystère, ne le découvre que par fragments et ne le livre que lorsque tous les volumes ont occupé leur place. L???uvre en cours est une discussion, décevante ou pleine de promesses. Nous cherchons des arguments. Nous écoutons les résonances sans encore en connaître la fin. Toutes ces émotions ne peuvent être prévues et connues entièrement à l??avance. Cela est bon ; un chantier sans anxiété serait comme une vie sans souffrance. » (Les Pierres Sauvages, page 136.)J'aime à me laisser guider par des impressions, des détails incongrus, comme un nom aux sonorités plaisantes, tel que Fernand Pouillon. Celui-ci, je l??ai appris depuis sur le site qui lui est dédié, était architecte (il fut l??assistant de Le Corbusier, pas moins) et homme de gauche, mais de la même gauche qu??Orwell : celle qui désire que le peuple se prenne en mains. Ses pratiques immobilières et architecturales, contraires à la politique de profit en vigueur dans le milieu du bâtiment, lui vaudront des problèmes qui, finalement, le mèneront en prison. C??est durant ce séjour qu??il écrit Les Pierres Sauvages, son seul roman, publié en 1964. Plutôt qu??être une longue complainte sur son sort, ce roman est une ode à l??architecture dans ce que celle-ci a de plus vigoureux et vivace.En fait de récit, Les Pierres Sauvages se présente comme le carnet de bord (ne parlons pas de journal intime, l??intimité n??a rien à faire ici) du second maître d???uvre de l??abbaye cistercienne du Thoronnet, carnet débuté le « dimanche de l??Oculi » 1161, autrement dit le cinq mars, et se concluant à la « Saint Sabas, cinquième jour de décembre » de la même année. Durant ces neuf mois, durée hautement symbolique s??il en est, le lecteur assiste au lent et éreintant/exaltant labeur des moines convers et des compagnons en vue de l??édification des premiers murs d??une des nombreuses abbayes d??un ordre alors en plein développement. C??est donc l??histoire d??un chantier médiéval d??importance, avec ses accidents (la pierre s??abreuve parfois littéralement de sang?) et ses instants de joie dans la lumière des diverses heures du jour rythmées par les offices. C??est ça, et c??est bien plus.Ce roman, au travers des réflexions de ce maître d???uvre dont je tais le nom en accord avec sa manière d??envisager son travail, est aussi un roman sur la foi, sur l??architecture, sur la foi en l??architecture et sur l??architecture de la foi, parsemé de citations bibliques (l??Apocalypse, le Cantique des Cantiques, les Proverbes?) et platoniciennes (rappel discret que oui, la philosophie grecque avait perduré en Europe depuis la fin de l??Antiquité), contenant des réflexions émouvantes au sens premier : qui font bouger l??esprit. Ainsi de celle-ci : « Notre art n??a pas de matériau plus ou moins noble, il emploie les matières divines et créent des formes assujetties aux complexes de celle-ci. » Ou encore les quelques phrases citées en ouverture de cette note.Quant à la vérité historique, il suffit de savoir que Pouillon a pris part à la restauration de diverses abbayes, de se référer aux notes éclairantes en fin de volume et au glossaire, les faits de l'auteur, pour comprendre que tout amateur de la chose médiévale trouvera ici son compte. Mais c??est surtout l??amoureux d??une belle et sobre écriture, et celui qui pense que la foi peut soulever les montagnes (ou bâtir des abbayes et des cathédrales), qui trouvera ici un intense plaisir de lecture.


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